Humbeline, vent debout pour la transmission de notre culture

« Jeune et contre » a été lancé par un groupe d’auditeurs de l’IFP afin de contrer la réforme du collège. Rencontre avec Humbeline, l’un des fondateurs. 


Née à Dijon en Bourgogne, Humbeline entre à Sciences Po’ à 18 ans. Elle se passionne rapidement pour l’histoire des pays d’Europe Centrale et Orientale, et part étudier à Prague. Cette expérience à l’Est forge ses convictions politiques : « j’ai été très marquée par l’étude des idéologies totalitaires. C’est ce qui a fondé mon attachement viscéral à la liberté, et un grand scepticisme face aux idéologies visant à construire un homme nouveau, déconnecté de son histoire et de son passé ».

Le souci de l’histoire et de la transmission

Ainsi accorde-t-elle «  une grande importance à notre histoire, dans sa totalité, en ce qu’elle est à mes yeux indétachable de notre identité. » Consciente des défis qui se posent aujourd’hui, Humbeline estime faire « partie d’une génération qui, confrontée à une mondialisation croissante, a besoin de savoir d’où elle vient, de s’unir autour d’une identité commune, d’un idéal partagé ». Aussi a t-elle rapidement perçu l’importance cruciale de l’éducation : « Le redressement de notre pays dépend, à mes yeux, de notre capacité à transmettre, dans le cadre de l’école, notre patrimoine commun. L’éducation est un enjeu collectif. »

L’engagement : une prise de risque

Désireuse d’en faire davantage, elle trouve à l’Institut de Formation Politique « un réseau de jeunes partageant mes convictions et un soutien pour le lancement de projets ». Les séminaires de niveau I, puis de niveau II lui permettent de comprendre « qu’il était possible d’entreprendre par soi-même des actions, que d’autres le faisaient et pouvaient m’aider ».

Elle y apprend à structurer ses projets. « Je n’osais pas me lancer, et je ne me sentais pas très légitime pour le faire ». Mais « l’IFP m’a réellement donné envie d’essayer, sans attendre une expérience et un niveau d’expertise qui pouvaient ne jamais venir ».

Elle prend courage et conscience de ses forces : « J’y ai compris que l”engagement, quelque soit sa forme, était toujours une prise de risque. Se réfugier derrière le manque d’expérience n’est bien souvent qu’un alibi pour se convaincre de rester en dehors des débats de la cité ».

Contrer l’idéologie de la rue de Grenelle

Ainsi, quand Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, lance sa réforme du collège, Humbeline lance « jeune et contre » avec plusieurs amis auditeurs de l’IFP. « Nous étions révoltés tant sur le fond de cette réforme que sur la méthode employée par le ministre de l’éducation nationale pour faire taire la contestation. »

Déterminée, Humbeline explique : « [cette réforme]est une véritable injustice faite aux collégiens. Elle consiste à les priver des mécanismes leur permettant de réussir. Dilution des enseignements fondamentaux, suppression du latin et du grec – oui, suppression, puisque seuls les collèges ayant un budget suffisant pourront désormais s’offrir ces classes – qui sont pourtant au cœur de notre culture, destruction des classes européennes et bilingues ».

« Cette confiscation d’une partie de notre culture est irresponsable et suicidaire, » poursuit-elle. Malheureusement, « mes amis et moi avons cherché à rejoindre un groupe, une association issue de la société civile qui défende ce point de vue ; or, seuls des intellectuels, des politiques, des syndicats d’enseignants et des parents d’élèves prenaient la parole à ce sujet, cantonnant le débat à un échange entre spécialistes de la question éducatives. Notre ambition était de montrer, au contraire, que les enjeux d’éducation concernent l’ensemble de la société ».

Ainsi créent-ils le collectif, « Jeune et Contre », afin de mobiliser et rassembler le plus de personnes issues de la société civile contre ce décret de réforme. Rapidement, ils publient une tribune puis une lettre ouverte « qui beaucoup circulé sur les réseaux sociaux (plus de 1500 partages) et a réuni, en l’espace de quelques jours, plus de 1300 personnes sur Facebook ». La presse quotidienne régionale s’intéresse rapidement à eux et l’opinion publique commence à les suivre : « Nous ne nous attendions pas à recevoir autant de retour de professeurs désemparés, de jeunes révoltés ou de parents d’élèves ne sachant plus comment se faire entendre ».

Fédérer l’opposition à la réforme

Humbeline et ses amis se veulent ambitieux : « Nous sommes donc actuellement en train de nous organiser nationalement et constituer un réseau de jeunes opposés à la réforme ». Ils mettent sur pied un véritable plan de bataille : « à court terme, nous voulons donc étendre la contestation, d’un point de vue géographique et politique. Il s’agit d’ancrer notre opposition au sein des régions, pour que le débat ne reste pas cantonné à un petit cercle d’experts parisiens. Il est ensuite question de fédérer l’ensemble des acteurs qui ont manifesté leur opposition à la réforme, et de mobiliser en premier lieu les jeunes. » Plus encore, « Nous avons également rejoint le recours porté devant le Conseil d’Etat, et qui vise à annuler le décret pris par la Ministre de l’Education ».

Mais cette bataille ne sera pas la dernière pour Humbeline. Elle a déjà prévu le prochain bras de fer : « la loi de refondation de l’école prévoit également une réforme du lycée en 2016. Pas question de se laisser prendre de vitesse cette fois-ci, nous serons prêts à défendre notre vision de l’enseignement ! »